La Campagne suisse contre les mines antipersonnel, soutenue par une cinquantaine d’oeuvres d’entraide, a permis de recueillir quelque 148 000 signatures demandant que la Suisse s’engage en faveur du bannissement total de ces mines. Ce point de vue devait être défendu devant la Conférence de l’ONU sur les mines antipersonnel qui se tenait à Vienne à la fin septembre 1995. On estime qu’actuellement plus de 100 millions de mines antipersonnel sont répandues dans le monde, et qu’elles blessent, mutilent et tuent sans discernement les populations civiles. Le Cambodge, par exemple, est infesté de 7 à 10 millions de mines antipersonnel et 70% des terres contaminées sont des rizières. Il faudrait, dit-on, plus de deux cents ans pour rendre l’ensemble des terres aux habitants. Pourtant, la délégation suisse à la Conférence de Vienne ne s‘est pas laissé attendrir: elle n’a pas revendiqué l’interdiction totale de ces engins. Selon son ambassadeur, “en tant qu’Etat, la Suisse a une stratégie différente. L’interdiction est illusoire si les Etats refusent de la signer. Mieux vaut une solution “réaliste”, comme l’interdiction des mines non détectables, des mécanismes d’autodestruction, plutôt que des grandes déclarations qui n’aboutiront à aucun traité”. La protection des enfants est-elle devenue un objectif irréaliste … ou irréalisable pour notre diplomatie ? Triste exemple de “Realpolitik”.