Abus sexuels sur les adolescents: publication d’une enquête réalisée à Genève

[ Bulletin DEI, Juni 1997 Band 3 Nr 2 S. 5 ]

«A CONTRE-COEUR, A CONTRECORPS, REGARDS PLURIELS SUR LES ABUS SEXUELS D’ENFANTS», tel est le titre révélateur d’un ouvrage publié en avril dernier par une équipe de chercheurs issus de divers secteurs de la santé, sous la direction des Dr. Daniel Halpérin et Paul Bouvier, pédiatres, et de Hélène Rey Wicky, psychologue. Traquer l’ampleur du phénomène des abus sexuels, qui constitue une réalité difficilement acceptée par notre société, et faire l’inventaire des ressources juridiques, sociales et thérapeutiques, tels étaient les buts poursuivis par les auteurs de cette étude épidémiologique.

La prévalence de ces abus a été mise à jour grâce à des enquêtes, sous forme de questionnaires anonymes, effectuées auprès de 1130 élèves appartenant au niveau de la 9ème du cycle d’orientation, à Genève. Le questionnaire soumis aux élèves portait sur un éventail de situations allant de l’abus sexuel sans contact (exhibitionnisme, vision de matériel pornographique) à une situation où l’enfant est contraint à subir des contacts sexuels non voulus (attouchements et viols).

L’analyse détaillée des données recueillies montre que, malgré les structures existantes, Genève n’est pas épargnée par le problème que constituent les abus sexuels, qu’ils soient intra-familiaux ou extra-familiaux. En effet, dix adolescents et trente-trois adolescentes sur cent ont été contraints sur le plan de leur sexualité au moins une fois; les cas d’abus graves concernent trois pour cent des garçons et vingt et un pour cent des filles. Qui sont les auteurs de ces abus ? Il ressort de l’étude menée qu’ils sont en général connus de la victime (père, beau-père, amis du même âge). Comment sont-ils découverts ? Il s’avère que moins l’abus est grave, plus il apparaît facile d’en parler. Ceux qui se décident à le faire exigent en général de leur confident que le secret soit gardé; l’effet protecteur que pourrait amener cette révélation n’a donc pas lieu.

Les chercheurs se sont également penchés sur le problème de la prévention: le constat qu’ils font au sujet de l’effet préventif de l’information donnée aux enfants et aux adolescents est nuancé. Elle peut aider à réagir face à une situation de péril, mais aussi avoir un impact négatif, si elle engendre des angoisses face à la sexualité.

En conclusion, les chercheurs soulignent l’importance de protéger l’enfant qui dénonce un abus, protection qui n’est pas encore accordée de manière systématique et adéquate.

(«A contre-coeur, à contre-corps. Regards pluriels sur les abus sexuels d’enfants. Une enquête épidémiologique auprès d’adolescents», sous la direction de D.S. Halpérin, P. Bouvier et H. Rey Wicky, Ed. Médecine et Hygiène, Genève, 1997, 180 p.).


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