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Défense des enfants international
section suisse
 
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Les sources des articles disponibles dans la recherche sont l'historique des bulletins DEI, la Convention des droits de l'enfant ainsi que certaines publication de DEI.


Qui est l'«exploiteur sexuel»? 1
  
[ Bulletin DEI, Dezember 2001 Band 7 Nr 4 S. I, II, III, IV ]

Il n’y a pas d’«exploiteur sexuel» en tant que tel. Il y a plutôt des gens (adultes et enfants, hommes et femmes) qui exploitent des enfants à des fins sexuelles de manières très différentes, pour bien des raisons et dans des cadres sociaux divers. Si l’on veut vraiment avancer sur la voie de l’élimination de l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales (ESEC) et, en fait, de ses formes non commerciales, cette diversité doit être reconnue, comprise et utilisée comme base de programmation.

Beaucoup de ceux qui s’occupent de la question de l’ESEC prennent mieux en considération et comprennent mieux sa complexité depuis le premier Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales (1996), mais cette complexité a été la grande absente du débat public et du débat d’orientation concernant la question de savoir qui exploite sexuellement des enfants à des fins commerciales. On a en fait largement continué à considérer que la demande d’ESEC pouvait être circonscrite aux «pédophiles» et aux délinquants qui leur fournissent des enfants à agresser. Or, elle s’étend bien au-delà.


Les pédophiles: une catégorie spécifique


La « pédophilie » est une catégorie de diagnostic clinique dont le sens est très spécifique et limité. Selon l’American Psychiatric Association, elle fait référence à une personne de plus de 16 ans qui «a eu sur une période d’au moins six mois des fantasmes répétés, intenses et sexuellement excitants, a éprouvé des pulsions sexuelles ou a eu un comportement impliquant des actes sexuels accomplis avec un ou plusieurs enfants (le plus souvent âgés de moins de 13 ans)». De plus, «les fantasmes, les pulsions sexuelles ou les actes liés au comportement en question perturbent profondément la capacité de la personne de fonctionner sur les plans social et professionnel ou sur d’autres plans importants».

Certaines des personnes dont le cas correspond à cette définition représentent une très grave menace pour les enfants et peuvent être individuellement responsables de l’agression sexuelle d’un grand nombre d’enfants. Mais pour faire l’objet d’un diagnostic clinique de «pédophilie», un individu ne doit pas nécessairement avoir commis un acte d’agression sexuelle sur la personne d’un enfant: on ne peut donc pas dire que tous les pédophiles sont des «exploiteurs

sexuels». Il serait encore plus faux d’affirmer que tous les «exploiteurs sexuels» sont des pédophiles, et cela resterait le cas même si le terme était employé de façon plus imprécise (comme il l’est dans le langage courant) pour désigner des adultes manifestant un intérêt sexuel pour de jeunes enfants.

Une autre mise en garde s’impose. Les personnes auxquelles s’appliquent les définitions cliniques de la pédophilie peuvent manifester un intérêt sexuel polarisé sur des enfants de sexe soit masculin, soit féminin, soit de l’un et de l’autre.

On a parfois donné des pédophiles une image stéréotypée, à savoir celle d’hommes ne s’intéressant qu’aux garçons, et les individus et groupes homophobes ont affirmé l’existence d’un lien entre homosexualité et l’agression sexuelle d’enfants. (…)


Les exploiteurs: un groupe plus vaste



Des non-pédophiles de types très divers exploitent eux aussi des enfants sur le plan sexuel, pour un certain nombre de raisons différentes. Les «exploiteurs sexuels» qui participent à l’ESEC en tant que «tiers bénéficiaires», par exemple, sont rarement motivés par un désir ou des fantasmes obsessionnels sexuels personnels. Ils exploitent sexuellement des enfants non parce que leurs actes d’exploitation leur apportent un soulagement psychique ou un plaisir sexuel, mais pour en retirer un profit. Il y a aussi ceux qui exploitent sexuellement des enfants lorsqu’ils se trouvent dans des situations où il est plus facile ou moins onéreux d’obtenir les services sexuels d’un enfant que ceux d’un adulte, sans que leur satisfaction soit liée à l’immaturité physique ou affective de l’individu qu’ils exploitent. Il existe également des hommes adultes qui choisissent de jeunes enfants comme partenaires sexuels en raison essentiellement des idées fausses qu’ils se font sur la santé sexuelle ou parce qu’ils ajoutent foi, manquant totalement d’esprit critique, aux mythes selon lesquels les vierges peuvent leur rendre leur virilité, leur porter chance en affaires, etc.

Les hommes appartenant à ces catégories ne sont pas mus par des fantasmes sexuels à propos des enfants en tant que tels. Qui plus est, si l’enfant s’entend d’une personne âgée de moins de 18 ans, il faut bien se rendre compte qu’il est rare que le contact sexuel entre un adulte et un enfant soit totalement prohibé. Dans la plupart des pays, un adulte peut légalement épouser une personne âgée de moins de 18 ans, cohabiter avec elle ou sortir avec elle. Par ailleurs, la plupart des sociétés assignent une grande valeur esthétique et érotique aux corps jeunes. Les adultes à la recherche de partenaires sexuels plus jeunes et plus attirants, notamment parmi les individus âgés de moins de 18 ans, ne transgressent pas nécessairement les conventions sociales applicables aux désirs sexuels acceptables et, partant, ne peuvent pas automatiquement être qualifiés de sexuellement «pervertis» ou de psychologiquement «anormaux».

En bref, à utiliser de façon interchangeable les termes «pédophile» et «exploiteur sexuel», on simplifie à l’extrême le phénomène de l’exploitation sexuelle des enfants. Il est indispensable de traiter sans plus attendre le problème de l’existence de ceux qui recherchent systématiquement et consciemment de jeunes enfants à agresser et du préjudice qu’ils causent, mais ce serait apporter une réponse incomplète à la question de savoir pourquoi et par qui les enfants sont sexuellement exploités. Il faut aussi se demander pourquoi des individus qui ne sont pas des pédophiles exploitent sexuellement des enfants.

On pourrait dire que les «exploiteurs sexuels» sont: «ceux qui profitent injustement d’un certain déséquilibre du pouvoir entre eux et une personne âgée de moins de 18 ans en vue de l’exploiter sexuellement dans l’attente soit d’un profit, soit d’un plaisir personnel».


Pourquoi font-ils cela ?


La définition proposée apporte la réponse à cette question en quatre membres de phrase: «avantage injuste», «déséquilibre du pouvoir», «dans l’attente d’un profit » et « dans l’attente d’un plaisir personnel ». (…)

Il découle de ce qui précède que, pour protéger les enfants contre l’ESEC, il importe de comprendre les principes qui inspirent et orientent les actes des exploiteurs sexuels et de trouver le moyen de contester et de décrédibiliser les idées qui leur permettent de nier, justifier, humaniser ou «normaliser» leurs actes d’exploitation. À cet égard, la manière dont des adultes se convainquent que l’utilisation d’un enfant au plan sexuel est justifiable est souvent liée, au moins partiellement, à la relation sociale dans laquelle l’exploitation s’inscrit.


Y a-t-il toujours transaction commerciale ?


Les résultats de la recherche concordent sur ce point: les enfants victimes d’agressions sexuelles dans des cadres non commerciaux sont beaucoup plus souvent agressés par des adultes qu’ils connaissent que par des inconnus; ils le sont en particulier par des personnes qui exercent le plus grand pouvoir sur eux: parents, tuteurs, proches et adultes tenant lieu de parents dans des cadres divers (jardins d’enfants, écoles, universités, résidences pour enfants handicapés ou non, églises, clubs sportifs et programmes d’échange à l’étranger).

Quelle que soit la forme sous laquelle l’agression se produit, il existe des liens importants entre l’agression sexuelle d’enfants et la conception et la représentation que la collectivité se fait de l’enfance. La plupart des sociétés non seulement permettent aux parents et aux adultes tenant lieu de parents d’exercer sur les enfants des pouvoirs d’un type et d’un degré qu’il serait inimaginable qu’ils exercent sur tout autre groupe social, mais attendent d’eux qu’ils le fassent. (…)

La corrélation existant entre les valeurs et mentalités sociales et l’agression sexuelle d’enfants est également attestée par la recherche, qui semble indiquer que les enfants issus de groupes qui sont mis au ban de la société (habitants des rues, travailleurs domestiques, handicapés, certains groupes ethniques, par exemple) sont parmi ceux pour lesquelles la menace d’une agression sexuelle est particulièrement forte. Ces enfants peuvent être pris pour cible parce que leur agresseur peut les rencontrer plus facilement ou pense que le risque de détection est faible, mais il semble également probable que la piètre «valeur» que la société leur assigne lui simplifie la tâche de déshumanisation de ses victimes, ce qui lui permet de rendre moins vif le sentiment de culpabilité ou d’angoisse qu’il aurait pu éprouver.

Il semble par ailleurs que le potentiel inhibiteur des codes et interdits édictés par la collectivité contre les contacts sexuels entre adultes et enfants soit lié à la conscience qu’a l’adulte des liens qui l’unissent à l’ensemble de la société. Quand ce lien se disloque, par exemple dans le cas de conflits armés ou de catastrophes naturelles, les individus parviennent souvent à justifier par des motifs rationnels une conduite qu’ils auraient jugé indéfendable dans d’autres circonstances. (…)


L’ESEC et la prostitution


L’exploitation sexuelle des enfants intervient également, bien entendu, dans un cadre commercial. L’industrie du sexe est une activité réprouvée qui s’exerce généralement dans le cadre d’une économie parallèle et/ou illégale, ce qui explique pourquoi il est extrêmement difficile d’obtenir des données fiables sur tel ou tel aspect de l’industrie mondiale du sexe. On peut toutefois émettre certaines hypothèses plausibles sur la demande de prostitution. Tout d’abord, la recherche montre que la demande est dans l’immense majorité des cas (mais pas exclusivement) le fait des hommes. Les études font également apparaître d’importantes différences entre les pays pour ce qui est du nombre d’hommes qui reconnaissent fréquenter des prostituées: ils sont environ 9% au Royaume-Uni, 14% à Hong Kong, 16% aux ÉtatsUnis, 38% en Espagne, entre 60 et 70% au Cambodge, 75% en Thaïlande, par exemple. (…)

On dispose toutefois de données empiriques sur la prostitution un peu partout dans le monde qui montrent que, s’il existe sur le marché de la prostitution de la plupart des pays un «créneau» de dimensions réduites et en grande partie caché qui alimente surtout la demande de ceux qui manifestent un intérêt spécifique pour les activités sexuelles avec de jeunes enfants ou des vierges, l’immense majorité des enfants prostitués sont intégrés au marché de la prostitution principal et répondent à la demande de tous les usagers. Ainsi, par exemple, on signale un peu partout dans le monde que des filles âgées de 12 à 18 ans se prostituent aux côtés de femmes de plus de 18 ans dans les complexes miniers, les quartiers chauds, les lieux touristiques, les ports et les relais-routiers, sur la voie publique et sous différentes formes de prostitution hors de la voie publique. Des garçons de moins de 18 ans sont également présents sur le marché principal de la prostitution masculine. (…) Beaucoup d’individus en viennent donc à exploiter sexuellement des enfants en tant qu’usagers de la prostitution, au lieu d’utiliser la prostitution comme moyen d’avoir accès auprès des enfants. (…)


Pourquoi certains exploiteurs sexuels forment-ils des réseaux ?


Les individus qui se présentent eux-mêmes comme des pédophiles entrent parfois en contact avec d’autres pédophiles pour former des réseaux qui leur permettent d’échanger des informations, des conseils et de la pédopornographie. Les membres de ces réseaux peuvent se livrer à différentes formes d’ESEC. (…) Il arrive souvent que les personnes auxquelles s’applique la définition clinique de la «pédophilie soient des collectionneurs invétérés d’images d’enfants et/ou d’agressions sexuelles d’enfants, notamment de photographies et d’enregistrements audio ou vidéo d’enfants agressés sexuellement par eux-mêmes et/ou par d’autres. La technologie numérique et l’Internet ont nettement renforcé la capacité de ces personnes d’enregistrer, de stocker, de rechercher et de partager d’importantes collections de pédopornographie. L’échange de pédopornographie avec des hommes ayant le même centre d’intérêt donnerait aux «agresseurs en ligne» un sentiment d’appartenance à un groupe et une bonne opinion d’eux-mêmes. Ceux qui collectionnent et échangent des documents représentant une agression sexuelle d’enfant ne le font généralement pas pour en retirer un profit matériel. Toutefois, l’Administration des douanes du Royaume Uni signale que, depuis quelques années, elle intercepte de plus en plus de pédopornographie produite à des fins commerciales, provenant en grande partie d’Europe orientale ou d’Amérique centrale. (…)


Qui profite financièrement de l’ESEC ?


Les personnes qui tirent des avantages économiques de l’industrie du sexe sont parfois riches et puissantes: fonctionnaires publics et de police, propriétaires d’entreprises du secteur des loisirs et du spectacle (secteur vivant souvent en symbiose étroite avec l’industrie du sexe), entreprises de tourisme, d’extraction minière, exploitation forestière et de transports maritimes sont indirectement parties prenantes à l’industrie du sexe en ce sens qu’une demande florissante de prostitution, notamment d’ESEC, est l’un des produits dérivés de leur activité commerciale principale et/ou de leurs politiques d’emploi (telles que la fourniture de logements en dortoir pour les travailleurs migrants de sexe masculin, au lieu de logement pour les hommes et leur famille). Toutefois, les personnes qui possèdent et contrôlent les entreprises sont rarement tenues pour personnellement responsables des coûts sociaux ou environnementaux associés aux secteurs dans lesquels elles opèrent. En fait, on leur rend souvent un hommage appuyé lorsqu’elles prennent ne fût-ce que la mesure la plus modeste pour atténuer les conséquences indirectes négatives des activités commerciales de leur firme.

D’autres tierces parties profitent de l’ESEC de manière plus directe. On peut retirer des gains financiers de l’ESEC par le canal d’activités diverses, comme la traite des enfants aux fins d’exploitation sexuelle; l’organisation et le contrôle des enfants livrés à la prostitution; l’offre de services sexuels d’enfants; la production et la distribution de pédopornographie dans un but lucratif. Il est également possible de retirer des gains financiers de l’ESEC sans vraiment y participer directement: pots-de-vin; les propriétaires de bar peuvent fermer les yeux sur l’ESEC pratiquée dans leurs locaux et profiter du fait que cette pratique grossit la clientèle de leur établissement ; les détaillants peuvent faire des bénéfices sur la vente de pornographie impliquant des mineurs. (…) D’autres tiers bénéficiaires de l’ESEC sont loin d’être des privilégiés et des personnages puissants: femmes, enfants ou hommes qui commencent leur « carrière » dans l’industrie du sexe en se prostituant, avant de passer à l’organisation de la prostitution d’autrui, notamment d’enfants. Il n’est pas non plus insolite de voir des prostituées, y compris des enfants, compléter leurs revenus en offrant les services sexuels d’autres personnes. Quel que soit leur âge ou leur sexe, beaucoup de gens sont associés en tant que tiers bénéficiaires de l’industrie du sexe pour des raisons identiques à celles qui rendent les enfants vulnérables à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, à savoir la misère, l’absence de perspectives économiques différentes et de possibilités de s’instruire, la violence dans la famille, la toxicomanie et/ou diverses pratiques et politiques sociales d’exclusion s’appuyant sur des vues discriminatoires concernant les sexes, la race, d’ethnicité, la caste et/ou la sexualité. (…) Dans bien des cas, il s’agirait de se préoccuper en premier lieu du cadre dans lequel s’inscrit l’exploitation sexuelle, non de l’individu exploiteur, et de formuler des programmes en conséquence.


En guise de conclusion


(…) Il n’existe pas de solution simple et unique applicable à ceux qui exploitent sexuellement les enfants à des fins commerciales. L’action de renforcement et d’application des lois contre l’ESEC doit être contrebalancée et complétée par des mesures à long terme de transformation de l’environnement qui produit des exploiteurs sexuels. Ces mesures requerront des investissements considérables et il faudra leur affecter des ressources suffisantes si l’on veut vraiment combattre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales dans le monde entier.

1 Ce texte reprend le résumé de «L’exploiteur d'enfants à des fins sexuelles», rédigé par le professeur Julia O’Connell Davidson. Ce texte est l’un des six documents thématiques préparés pour l’information des participants au deuxième Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, Yokohama (Japon), 17–20 décembre 2001. Il a été amputé de certains passages pour pouvoir figurer comme dossier de ce Bulletin, mais le document est disponible dans son intégralité sur le site Internet du Congrès, à l’adresse suivante: http://www.focalpointngo.org/yokohama/french/presskit/background2.htm






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