La pauvreté des enfants : la face cachée des pays industrialisés

[ Bulletin DEI, Juni 2006 Band 12 Nr 2 S. 7 ]

Par Lenka Pekarkova

Aujourd’hui, vu le niveau très élevé de la qualité de vie dans la plupart des pays de l’Union Européenne, on a du mal à imaginer qu’il peut y avoir encore des enfants qui se couchent au quotidien avec le ventre vide, des enfants qui se lavent une fois par semaine, des enfants qui n’ont jamais porté de vêtements neufs. Malheureusement, c’est le côté sombre du modèle économique européen.

Selon l’étude 2005 sur la pauvreté des enfants dans les pays riches, réalisé par le Centre de recherche Innocenti de l’Unicef, la proportion d’enfants vivant dans la pauvreté a augmenté dans 17 pays sur 24 de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques). Au niveau européen, les pays affichant les taux les plus faibles sont le Danemark et la Finlande où la proportion des enfants pauvres est de moins de 3%. Les taux les plus élevés se trouvent en Italie, Irlande, Portugal, et dans le Royaume-Uni où ils dépassent 15%.

Ces chiffres sont la preuve irréfutable que la société actuelle doit faire face à un problème qui devient une véritable bombe à retardement. La question de la pauvreté doit être considérée comme particulièrement importante et cela pour deux raisons principales. La première est que la plupart des courants de philosophie politique s’accordent pour dire qu’en matière de justice sociale, il est du devoir de la société de compenser ou de corriger des inégalités subies à tout le moins par les personnes qui ne portent aucune responsabilité dans la situation qu’elles connaissent. Ceci s’applique aux enfants plus qu’à toute autre personne. La seconde raison tient aux conséquences de la pauvreté éprouvée dans l’enfance sur les devenirs à l’âge adulte. Un nombre impressionnant de travaux soulignent que la pauvreté éprouvée dans l’enfance accroît les risques de la connaître à l’âge adulte. Il s’agit bien d’une augmentation des risques et non heureusement d’un déterminisme absolu, mais elle est suffisamment significative pour justifier sa prise en considération dans les politiques publiques.

La position de l’Unicef à ce sujet est très ferme. Il considère que les gouvernements des pays de l’OCDE doivent impérativement renverser cette tendance car le fait de permettre le type de pauvreté qui prive les enfants des possibilités considérées comme normales par la plupart des gens constitue une violation de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant. La réduction de la pauvreté des enfants est essentielle au maintien ou au renforcement de la cohésion sociale et de l’égalité des chances. Il s’agit d’un investissement dans le monde des enfants d’aujourd’hui et de demain.

Le plus grand progrès dans ce sens sur le continent européen peut être observé du côté du pays natal de Shakespeare, le Royaume-Uni. Jusqu’à la fin des années 90, le Royaume-Uni avait le taux de pauvreté des enfants le plus élevé de l’Europe. Suite à l’élection de Tony Blair au poste de Premier ministre, le gouvernement britannique a inauguré une nouvelle approche de contrôle et de réduction de la pauvreté qui s’est révélée par la suite payante. Il s’est engagé à diminuer de moitié la pauvreté des enfants d’ici 2010 et à l’éliminer d’ici 2020. Néanmoins, après une dizaine d’années de la politique sociale de Blair, l’heure est venue de faire les premiers bilans. Un rapport publié par l’ « Institute of Public Policy Research » révèle que, si d’un côté le taux de pauvreté a diminué en Grande Bretagne, de l’autre côté, le fossé entre les riches et les pauvres s’agrandit inéluctablement chaque jour. Ainsi les prévisions de diminuer de 25% le nombre d’enfants vivant dans des familles au-dessous de 60% du revenu médian d’ici 2004/2005, semblent avoir été atteintes, mais malheureusement on est obligé de constater que le nombre de famille sans domicile fixe a progressé de 17%.

Il est évident que le combat contre la pauvreté des enfants est mené au Royaume-Uni ainsi qu’au sein de plusieurs pays européens. Même si ces derniers ont gagné beaucoup de batailles, la guerre est loin d’être terminée car il reste entre 40 et 50 millions d’enfants vivant en dessous des seuils de pauvreté nationaux parmi les pays les plus riches du monde.

Sources :
Unicef : rapport sur la pauvreté des enfants en Europe 2005, www.unicef.org
Tribune de Genève, article du 17 février 2006 : « un million d’enfants SDF au Royaume-Uni »


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