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Défense des enfants international
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Les sources des articles disponibles dans la recherche sont l'historique des bulletins DEI, la Convention des droits de l'enfant ainsi que certaines publication de DEI.


Enfants de détenus et délinquance juvénile: risques et prévention

Par Emmanuelle GRANZOTTI, Carrefour Prison

  
[ Bulletin DEI, Juni 2008 Band 14 Nr 2 P.8 ]


Avant d'aborder la question des conséquences d'une rupture entre l'enfant et son parent incarcéré, il est important de souligner l'ampleur du phénomène sur notre continent. Les chiffres les plus importants, selon les études réalisées, concernent l'Angleterre/le Pays de Galles avec 100'478 enfants touchés, l'Espagne avec 79’512 enfants et l'Italie avec 73’489 enfants ayant un père ou une mère incarcéré-e. Les chiffres relatifs aux autres pays (dans l'ordre de croissance: l'Irlande, la Suède, le Portugal, les Pays Bas et la France) ayant fait l'objet d'une étude sur le sujet varient entre environ 4’500 et 70’000 (Ayre, Philbrick & Reiss, 2006). En Suisse, il est à déplorer qu'aucune étude à ce jour n'ait encore été menée. Malgré l'existence d'articles dans la Convention européenne des droits de l'homme (article 8) et de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant (articles 3,9 et 12), l'enfant privé d'un de ses parents suite à son incarcération ne semble pas faire l'objet d'une préoccupation de santé publique. Or, comme il va être démontré plus loin, les conséquences d'une telle séparation sur la santé psychique et physique de l'enfant, ainsi que de ses parents, sont nombreuses et coûteuses.

Conséquences et risques


L'impact sur l'enfant de la séparation d'un de ses parents va être différent selon la situation économique de la famille, l'importance des conflits préexistants, le genre de l'enfant, mais surtout selon son âge (Lafortune, Barrette, Dubeau, Bellemare, Brunelle & al., 2004). Si l'incarcération du parent a lieu alors que l'enfant a moins de deux ans, il est estimé que la formation du lien affectif avec le parent sera fortement compromise. Entre deux et six ans, des troubles anxieux, une régression au niveau du développement, un stress traumatique aigu et de la culpabilité risquent de se manifester. Entre sept et dix ans, les effets principaux sont toujours la présence d'un stress traumatique aigu ainsi que des troubles du comportement. A l'adolescence (entre 11 et 14 ans), ces troubles vont s'accentuer et peuvent se manifester par un rejet des règles et des limites de la part du jeune. De 15 à 18 ans, le risque d'un glissement vers la délinquance juvénile est de plus en plus présent avec comme conséquence une rupture prématurée des liens de l'adolescent avec ses parents et un risque accru de criminalité et d'incarcération (King, 2005). En effet selon les études, l'enfant de détenu court entre cinq et six fois plus de risques d'être incarcéré à son tour qu'un enfant de parents non détenus (King, 2005, Florida House of Representatives - Justice Council, cité par Woodward, 2003). La stigmatisation sociale et l'isolation que subit l'enfant peuvent le conduire à adopter d'autres attitudes dangereuses pour son bien-être et favoriser l'association à des pairs déviants, ainsi que le passage au crime et à la délinquance. Parallèlement à cela, il n'est pas rare que les enfants de détenus aient d'importantes difficultés scolaires, des conduites sexuelles précoces et à risque, qu'ils quittent le domicile familial prématurément, se marient à un jeune âge, ne travaillent pas, etc. A noter que, comme mentionné plus haut, il existe une différence selon le genre des enfants: les filles seraient plus enclines à présenter des problèmes d'attention et de concentration alors que les jeunes hommes manifesteraient plus de comportements agressifs, anti-sociaux et délinquants. Il existe pourtant de nombreux programmes, aux Etats-Unis1 notamment, qui ont pour objectif d'enrayer, voire de prévenir ce phénomène.


Prévention de la délinquance juvénile


Afin de tenter de prévenir un glissement vers la délinquance juvénile des enfants de personnes incarcérées, il est important de travailler avec tous les acteurs en cause: l'enfant, son parent incarcéré et les personnes responsables de l'enfant. Certains des axes visés sont d'augmenter le contact entre le parent incarcéré et son enfant (visites, courrier, téléphone, activités) et d'améliorer les structures où ont lieu les visites afin de faciliter l'interaction familiale. D'autres solutions concernent l'amélioration des compétences parentales à travers des cours de formation à l'intérieur des établissements de détention, mais aussi à l'extérieur à travers des aides à domicile. De même, il ne faut pas minimiser l'importance de la réinsertion sociale et professionnelle de l'ancien(ne) détenu(e) afin de lui permettre de rétablir une bonne image de soi et sa place dans la société. En ce qui concerne l'enfant, des thérapies individuelles, de famille et de groupe peuvent être très bénéfiques.

Conclusion


Il est particulièrement frappant de remarquer que dans un pays comme le nôtre, qui compte environ 6’000 détenus, il n'existe que peu d'aide de ce type pour ces enfants amputés d'un de leur parent. Ceci est d'autant plus marquant que des pays en voie de développement comme le Cameroun, par exemple, sont en train de créer des Relais Enfants-­Parents sur le modèle français, alors que leurs moyens économiques et leur régime politique ne sont largement pas aussi favorables que ceux de la Suisse. A partir de ces constatations, l'association Carrefour Prison s'est donné comme l'un de ses projets principaux de continuer à sensibiliser la population à cette problématique, ainsi que de travailler à la mise sur pied de structures et de moyens afin d'assurer une aide concrète à ces victimes de l'indifférence sociale.

Cet article est une version révisée d’un article paru sous le même titre dans la Revue Suisse de Criminologie no 2-2007



notes:


1 La situation des enfants de détenus aux Etats-Unis n'a volontairement pas été abordée dans cet article. En effet. plus de 1 500 000 enfants seraient concernés et ces chiffres ne sont pas comparables à ceux dont nous disposons en Europe, tant la population considérée est importante.

Bibliographie:



Ayre L., Philbrick K. & Reiss M., Children of Imprisoned Parents: European perspectives on good practice. Eurochips, Paris, 2006.
Eddy J & Reid, The antisocial behaviour of the adolescent children of incarcerated parents: a developmental perspective, Paper presented at the Conference «From Prison to Home», Washington, 2002. http://www.urban.org/publications/410631.html
King D., National evaluation of the prisoners and their families program, Australian Government Attorney-General's Department, Melbourne, 2005.
Lafortune D., Barrette M, Dubeau D, Bellemare D. Brunelle N., Plourde C. & Cusson J-F., Un père incarcéré: facteur de risque ou de protection pour ses enfants? Forensic, numéro spécial Psychiatrie & Violence, 2004 4 (2), 15-22.
Woodward R., Families of prisoners: literature review on issues and difficulties, 2003. http://www.facsia.gov.au/internet/facsinternet.nsf/research/ops-ops10.htm







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