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Défense des enfants international
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Suppression du lien de filiation en cas de mariage de complaisance

Par Cora Fischer

  
[ Bulletin DEI, März 2009 Band 15 Nr 1 S.12 ]



Dans le cadre de la récente révision totale de la Loi sur les étrangers (LEtr, RS 142.20), deux dispositions ont été ajoutées à notre Code civil (CC, RS 210) dans le but de lutter contre les mariages fictifs. L’une consacre le fait qu’un mariage jugé fictif constitue une cause absolue d’annulation du mariage (art. 105 ch. 4 CC). L’autre institue une exception au principe de non-rétroactivité de l’annulation du mariage, en prévoyant la suppression de la présomption de paternité découlant d’un mariage fictif (art. 109 al. 3 CC). Une initiative parlementaire visant le retrait de cette seconde disposition, en raison de son incompatibilité avec la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant (CDE, RS 0.107), vient pourtant d’être rejetée par le Conseil national(1).



De nombreuses voix se sont pourtant élevées contre l’article 109 al. 3 CC. La professeure de droit Suzette Sandoz considère notamment que cette mesure « barbare » constitue une « violation des règles les plus élémentaires du droit dans une nation civilisée »(2). Une expertise(3) rédigée par la juriste Sylvie Marguerat, le professeur de droit des étrangers Minh Son Nguyen et Jean Zermatten, membre du Comité des Nations Unies pour les droits de l'enfant, conclut à l’incompatibilité de ce nouvel alinéa avec plusieurs dispositions de la CDE.

Une mesure contraire à de nombreux articles de la CDE


En effet, par ses articles 7 al. 1 (droit à un nom, à une nationalité et, dans la mesure du possible, droit de connaître ses parents et d’être élevé par eux) et 8 (droit de préserver son identité), la CDE reconnaît à tout enfant le droit à une filiation. En privant un enfant de sa filiation paternelle, on le prive non seulement du nom et de la nationalité qu’il aurait acquis par son père, mais aussi de l’ensemble des droits et devoirs découlant de la filiation, en particulier du droit à l’entretien. L’article 109 al. 3 CC viole donc le droit de chaque enfant, reconnu par la CDE, d’avoir une filiation.
De plus, selon l’article 2 al. 1 CDE, « les Etats parties s’engagent à respecter les droits qui sont énoncés dans la présente Convention et à les garantir à tout enfant relevant de leur juridiction, sans distinction aucune (…) ». L’article 109 al. 3 CC fait pourtant une distinction entre les enfants dont le mariage des parents est annulé pour cause de mariage fictif et les autres enfants.

L’intérêt supérieur de l’enfant : une considération primordiale?


Selon l’article 2 al. 2 CDE, un enfant ne devrait jamais être sanctionné ou discriminé en raison du comportement ou de la situation de ses parents. Or, en privant l’enfant né dans un mariage jugé fictif de sa filiation paternelle, l’article 109 al. 3 CC affecte directement le statut de l’enfant en raison du comportement de ses parents.
Le Conseil fédéral motive cette mesure par le fait que « selon l’expérience générale de la vie, l’enfant issu d’un mariage de complaisance n’est normalement pas né des Ĺ“uvres du mari de la mère » et que « la mesure envisagée permet ainsi de rétablir la vérité biologique »(4). Or, d’une part, cette affirmation n’est corroborée par aucune donnée statistique. D’autre part, il est reconnu en doctrine que l’existence d’un lien de filiation paternelle correspond à l’intérêt de l’enfant, quand bien même ce lien ne correspondrait pas à la vérité biologique. Le législateur admet d’ailleurs lui-même que la vérité biologique ne doit pas toujours primer en matière de filiation, en acceptant par exemple l’adoption ou en ne permettant qu’au mari et, dans certains cas seulement, à l’enfant, d’agir en désaveu de paternité (art. 256ss CC). Il semble que ce soit ici l’intérêt public au respect des normes du droit des étrangers, et non la vérité biologique, qui ait motivé l’adoption de l’article 109 al. 3 CC. Celui-ci constitue donc une violation de l’article 3 CDE, selon lequel « dans toutes les décisions qui concernent les enfants, (…) l’intérêt supérieur de l’enfant doit être une considération primordiale ».

Par ailleurs, la proportionnalité de cette mesure est pour le moins discutable. D’une part, le droit de la filiation permet déjà de remettre en question un lien de filiation qui ne correspond pas à la vérité biologique et d’en créer un nouveau. D’autre part, l’intérêt au respect du droit des étrangers, si important soit-il, ne saurait justifier que l’on pénalise des enfants pour une situation dont ils ne peuvent en aucun cas être tenus pour responsables.

En conclusion, et contrairement à l’avis de la majorité de la Commission des affaires juridiques du Conseil national, il faut admettre que l’article 109 al. 3 CC constitue une grave violation de la CDE. Il est regrettable que le Conseil national ait décidé de ne pas donner suite à l’initiative visant à supprimer cet alinéa.



1.Initiative parlementaire Menétrey-Savary 06.465 « Initiative parlementaire. Suppression du lien de filiation en cas d'annulation de mariages dits de complaisance. Compatibilité de la loi sur les étrangers avec la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant
2.«Pas de police des étrangers dans les salles de mariages », Le Temps, 16 juin 2006 ; voir aussi « Dann doch lieber falsche Ehen », NZZ am Sonntag, 11 juin 2006.
3.« La loi sur les étrangers et la loi sur l’asile à la lumière de la Convention relative aux droits de l’enfant », Terre des Hommes, www.tdh.ch
4.Message du Conseil fédéral relatif à la nouvelle loi sur les étrangers, FF 2002 p. 3593.











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