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Défense des enfants international
section suisse
 
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Les sources des articles disponibles dans la recherche sont l'historique des bulletins DEI, la Convention des droits de l'enfant ainsi que certaines publication de DEI.


Entretien avec Mme Leïla ZERROUGUI
Présidente-Rapporteur du Groupe de travail sur la détention arbitraire du Conseil des droits de l’homme

  
[ Bulletin DEI, décembre 2007 Vol 13 No 4 p.4 ]


En novembre dernier, DEI-Suisse s’est entretenue sur la problématique des mineurs en détention avec Madame Leïla Zerrougui, l’actuelle Présidente-Rapporteur du Groupe de travail sur la détention arbitraire. Depuis 1980, Mme Zerrougui est juge en Algérie, où elle a également occupé la fonction de conseillère au cabinet du ministre de la justice. Mme Zerrougui est l’un des cinq auteurs du rapport des Nations Unies sur les abus commis à l’encontre des détenus de Guantanamo Bay, à Cuba.

Le Groupe de travail sur la détention arbitraire, créé en 1991 par la Commission des droits de l’homme, est composé de cinq experts indépendants chargés d’enquêter sur les allégations de privations arbitraires de liberté. Ce Groupe de travail est le seul mécanisme non conventionnel dont le mandat prévoit expressément l’examen de plaintes individuelles. Le Groupe reçoit les plaintes des organisations de défense des droits humains, ou de personnes directement concernées, faisant état de détentions arbitraires. Depuis 1993, le Groupe de travail est autorisé à se saisir de sa propre initiative (autosaisine) lorsque son attention se porte sur des allégations de détention arbitraire.


DEI: Quelle place occupent les mineurs en détention au sein du mandat de votre Groupe de travail ?



La détention des mineurs est couverte par le mandat du Groupe, mais je reconnais qu'elle a été pendant longtemps reléguée au second plan. Nous pensions à tort, je l'admets, que le Comité des droits de l'enfant peut en assurer une prise en charge plus complète puisqu'il a une compétence universelle et couvre tous les droits de l'enfant. Depuis, nous considérons la détention des enfants comme un sujet de préoccupation majeur. Nous avons d'ailleurs inscrit dans notre rapport annuel les violences sexuelles subies par les mineurs en détention parmi les sujets de préoccupation méritant une prise en charge de la part du Conseil des droits de l'homme.

DEI: Quels sont les critères de sélection des plaintes?



ll n’existe pas de conditions de recevabilité définies, et pas de restrictions de forme. L’information envoyée au Groupe doit être suffisamment détaillée : le cas doit nous permettre d’y répondre de manière explicite. Notre Groupe n’a pas pour mandat de se prononcer sur l'innocence ou la culpabilité, il ne se prononce pas sur les preuves, mais sur le respect des normes d'un procès équitable en confrontant la législation nationale et la pratique avec les standards internationaux.

Quid des plaintes concernant des mineurs détenus?



Au cours de mes deux mandats, notre Groupe n’a été saisi que d’une seule plainte concernant la détention d’enfants aux Philippines. Comme notre mandat ne couvre pas les conditions de détention, nous essayons d'établir un lien entre ces dernières et la légalité de la détention. Souvent, nous considérons que parce que les conditions de détention sont très mauvaises, la personne détenue n'est pas en mesure de préparer sa défense dans de bonnes conditions et nous concluons au caractère arbitraire de la détention. Notre Groupe souhaite vivement recevoir d’avantage de plaintes concernant la détention arbitraire de mineurs. Le rôle des ONGs est très important à cet égard.

Quelles sont les principales préoccupations du Groupe concernant les mineurs détenus?

Tout d’abord, le fait qu’il n’existe aucun mandat spécifique sur la situation des enfants privés de liberté. Les conditions de détention, le droit à la réinsertion et à la réhabilitation, ne relèvent d’aucune procédure spéciale. Ce vide au niveau institutionnel constitue un problème grave qu’il faut soulever au Conseil des droits de l’homme. Il faut impérativement sensibiliser la société à ce problème. La détention est, non seulement, une initiation au crime pour les enfants, mais aussi, dans la majorité des pays visités par notre Groupe, les enfants sont systématiquement violés dans le cadre de leur détention et utilisés comme des objets sexuels, lorsqu’ils ne sont pas séparés des adultes. Ce qui est totalement inacceptable.
Une autre préoccupation porte sur l’âge minimum de responsabilité pénale (le MACR). Dans les pays où le MACR est élevé, les enfants sont utilisés par les adultes pour commettre des crimes ou des infractions, puisqu’ils ne sont pas jugés responsables de leurs actes. Afin de contrer ces abus, les gouvernements ont tendance à abaisser le MACR. Par ailleurs, nous avons constaté que sur le terrain, les services d'application de la loi confondent l'âge minimum de la responsabilité pénale et l'âge de la majorité. Dans certains pays, la loi ne prévoit pas de justice spéciale pour les mineurs de moins de 18 ans qui ont atteint l'âge de la responsabilité pénale. Il s'agit souvent des 16 à 18 ans qui sont traités et jugés comme des adultes, et détenus avec eux. L'absence de justice des mineurs peut alors être atténuée par une «excuse de minorité» qui réduit leur peine maximum. Malheureusement, une telle disposition n'existe pas toujours. C'est très inquiétant, parce que la loi peut prévoir la peine de mort ou la peine de prison à vie pour un mineur.


Vient enfin le problème du terrorisme. De nombreux enfants sont détenus dans le cadre de la lutte anti-terrorisme. Dans les pays d’Amérique du Sud et aux Caraïbes, beaucoup d’enfants sont détenus pour associations illégales: les «maras». De nombreux enfants palestiniens sont aussi détenus pour « terrorisme ». Tout le monde perd la protection (juridique) quand le terrorisme est invoqué.

Comment se déroulent vos visites sur le terrain?



Les visites ont lieu sur invitation des Etats(1). Nous bénéficions de certaines invitations permanentes, mais les visites sont souvent sollicitées par notre Groupe. Lors de ces visites, nous nous rendons systématiquement dans les centres de détention pour mineurs, ou, à défaut, dans les «quartiers» réservés aux mineurs des prisons. Nous rencontrons des mineurs détenus dans le cadre d’entretiens strictement confidentiels, et à l’unique condition que des garanties de sécurité soient assurées afin d’éviter des représailles. Nous nous entretenons aussi avec le plus grand nombre de personnes intervenant dans le processus qui mène à la détention d’un individu, à savoir: l’administration judiciaire et pénitentiaire et des membres du gouvernement. Notre Groupe essaye toujours de sensibiliser les juges des mineurs aux conséquences de la détention sur des personnes si jeunes.



Effectuez-vous un suivi de ces visites? Ont-elles entraîné des réformes législatives?



Nous formulons des recommandations dans nos rapports de visite et, deux ans après, nous demandons par lettre aux gouvernements quels changements ont été introduits. La coopération des ONGs sur le terrain et les rapports qu’elles nous envoient favorisent grandement ce suivi. Notre Groupe n’a pas la prétention de dire que ses visites et les rapports qui s’en suivent ont déclenché des réformes. Toutefois, en Equateur, la «detención en firme», une sanction utilisée pour prolonger la détention préventive au-delà des limites autorisées par la Constitution du pays et par les normes internationales, a été déclarée inconstitutionnelle.


Pouvez-vous nous donner un exemple de « bonne pratique »?



Le Groupe a été impressionné par le système de justice des mineurs en Norvège et notamment l’intérêt que le gouvernement porte aux enfants. Seuls 6 enfants étaient maintenus en détention lors de notre visite. En Turquie, les enfants sont séparés des adultes et il existe une police ainsi que des magistrats spécialisés pour les mineurs. Un problème concerne cependant les centres de «prévention» pour les mineurs n’ayant pas commis d’infractions mais que l’Etat cherche à protéger. Les mineurs qui sont placés dans des centres ouverts ne relèvent pas de notre mandat. Par contre, ceux qui se trouvent dans un centre fermé le sont: en effet, nous qualifions de détention toute privation de liberté qu'elle soit administrative ou judiciaire, dans une prison, une maison ou un centre. L'essentiel c'est que la personne est enfermée dans un endroit qu'elle ne peut quitter librement.




Quel type de collaboration existe-t-il entre votre Groupe et les autres procédures spéciales?



Notre Groupe collabore régulièrement avec les autres procédures spéciales (Groupes de travail et Rapporteurs spéciaux), notamment celles sur les disparitions forcées ou involontaires, la torture, les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, etc. Si une plainte renferme plusieurs violations et que notre Groupe est compétent sur certaines, mais qu’il existe d’autres violations plus graves et urgentes relevant d’une autre procédure spéciale, alors le cas est transféré à cette autre procédure. D’autre part, si la plainte est un «Appel Urgent», la collaboration entre les diverses procédures spéciales est systématique. Une seule requête est alors adressée au gouvernement, ce qui simplifie la procédure et renforce la plainte puisque plusieurs Rapporteurs spéciaux y contribuent.

Propos recueillis par Eléonore Lette

Pour obtenir plus d’informations sur le Groupe de travail sur la détention arbitraire et comment déposer une plainte, voir le site: http://www.unhchr.ch/french/html/menu2/7/b/arb_det/ardintro_fr.htm



(1)Le Groupe vient de recevoir une invitation des Etats-Unis, de l’Italie ainsi que de Malte. Au Moyen-Orient, seul l’Etat de Bahreïn a été visité. En Afrique, le Groupe revient d’une visite en Angola et en Guinée Equatoriale et prépare une visite au Sénégal et en Mauritanie








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