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Défense des enfants international
section suisse
 
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Les boîtes à bébé se multiplient en Europe.
Par Dannielle Plisson

  
[ Bulletin DEI, septembre 2012 Vol 18 No 1 p.4-5-6 ]




On les trouve à l'entrée des hôpitaux, sur le parvis des mairies, à proximité des églises ou dans des rues très fréquentées. De loin, elles ressemblent à de larges coffres-forts vitrés, souvent peints en jaune vif. A l'intérieur, un lit auto-chauffant, une caméra, et un signal d'alarme relié au centre de soins le plus proche. Sur la porte, un mode d'emploi rudimentaire indique comment ouvrir le coffre, y déposer son bébé, puis le refermer.

Au Moyen-Age, on les appelait les "tours d'abandon". Aujourd'hui, ce sont les "boîtes à bébé", destinées aux parents en détresse qui veulent abandonner leur nouveau-né dans l'anonymat absolu, ces boîtes se multiplient en Europe, à tel point que les Nations unies tirent la sonnette d'alarme. Du milieu du XIXème siècle à la fin du XXème, on n'en trouve plus trace... jusqu'à la fin des années 90 où le principe réapparaît sous la forme d'une boîte à bébé : un landau, à l'abri, où une maman peut abandonner son enfant.

Onze pays concernés

Le système avait pourtant disparu depuis plus d'un siècle en Europe. Mais la médiatisation de faits divers glaçants, comme l'abandon de nouveau-nés dans des poubelles, a remis au goût du jour cette pratique qui semblait d'un autre temps. L'Allemagne a été la première à réintroduire le mécanisme en avril 2000. Depuis, dix autres pays européens l'ont adopté, comme l'Italie, la Hongrie, l’Allemagne, la Belgique, la Suisse ou encore la Pologne. Aujourd'hui, plusieurs centaines de "boîtes à bébé" sont installées sur le Vieux continent.
Le fonctionnement est simple. Dans la plupart des pays qui utilisent ce système, le parent qui abandonne anonymement son enfant dans une de ces "boîtes" dispose de huit semaines pour revenir sur sa décision. Les services hospitaliers vérifient son identité grâce aux empreintes digitales prélevées sur le nouveau-né au moment où il est récupéré. Passé ce délai, une procédure d'adoption classique est enclenchée, tandis que l'Etat devient légalement responsable de l'enfant.

Violation du droit d’un enfant de connaître ses parents

S'il semble progressivement être entré dans les mœurs, un tel système n'en est pas moins controversé, tant au point de vue éthique que légal. Les défenseurs de cette pratique sont souvent les mêmes qui militent contre l'avortement. Différents groupes religieux ou partis politiques de droite affirment ainsi que le dispositif "protège le droit d'un enfant à la vie" et sauve "des centaines de nourrissons". Depuis 2000, près de 400 enfants auraient été ainsi abandonnés.

Mais les Nations unies ont exprimé à plusieurs reprises leur inquiétude grandissante sur le système, car il viole le droit fondamental d'un enfant de connaître ses parents. Le comité, chargé de contrôler l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant, estime en effet que ces "boîtes à bébé" vont "à l'encontre du droit de l'enfant à ce que son ou ses parents le connaissent et s'occupent de lui".

La Convention relative aux droits de l'enfant précise en effet que tout enfant a "dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux". En outre, elle stipule que "si un enfant est illégalement privé des éléments constitutifs de son identité ou de certains d'entre eux », les Etats parties doivent lui accorder une assistance et une protection appropriées, pour que son identité soit rétablie aussi rapidement que possible". Or les bébés récupérés grâce à ces "boîtes" ne peuvent avoir accès, une fois adultes, à l'identité de leurs parents.

Avant tout, l'ONU préconise d'avantage de prévention et d'encadrement des femmes en détresse pour qu'elles ne ressentent pas le besoin d'avoir recours à une « boîte à bébé ».

Dans les faits, le système soulève également de nombreuses interrogations. Un chercheur de l'université de Nottingham, Kevin Browne, a étudié pendant deux ans le phénomène. Cité par Le Guardian, il affirme que "ce sont fréquemment des hommes ou des proches qui abandonnent l'enfant, ce qui pose des questions sur la situation de la mère, et sur son consentement à cet abandon". Le caractère anonyme de l'abandon empêche également le déclenchement de tout accompagnement du parent, et annihile toute "chance pour l'enfant d'être élevé par d'autres membres de sa famille".

Législations diverses

Dans la plupart des pays européens qui les ont mises en place, les "boîtes à bébé" viennent pallier une absence ou un flou de la législation sur le droit d'abandonner un enfant, voire sur le droit à l'avortement. Presque toujours illégal, l'abandon d'enfant n'en est pas moins une réalité avec laquelle les Etats doivent composer.

En France, la question ne se pose pas. Une femme a en effet le droit "d'accoucher sous X", ce qui lui permet d'abandonner son bébé juste après l'accouchement. L'enfant ainsi né, lorsqu'il atteint "l'âge de discernement" et avec "l'accord de ses représentants légaux", peut avoir accès aux informations laissées par ses parents à la naissance. Mais le système ne fait pas non plus l'unanimité, et nombreux sont ceux qui réclament sa suppression.

Au regard des droits de l’enfant, les « boîtes à bébé » sont hautement discutables. La tolérance étatique face à l’expansion des offres, qui se développent dans une zone juridique grise, menace la protection de droits de l’enfant de base.

En Suisse, la seconde « boîte à bébé » a été mise en service à Davos. D’autres projets sont apparemment examinés. Cette installation est hautement discutable au regard des droits de l’enfant, ce qui n’est pas abordé dans le débat public qui entoure la question. Dans les faits, les « boîtes à bébé » ne contribuent pas à la diminution des infanticides ou d’abandons d’enfants. En outre, se pose la question de la balance entre le droit à la vie et au développement (art. 6 CDE) et le droit de l’enfant à connaître son identité et à entretenir des relations avec ses parents (art. 7 et 8 CDE).

Le Conseil de l’éthique allemand a recommandé en 2009 sur la base d’arguments détaillés de renoncer aux « boîtes à bébé ». Terre des hommes Allemagne a demandé, suite à une recherche de l’institut allemand de la jeunesse, l’interdiction des « boîtes à bébé » ainsi que de leur publicité aussi longtemps que la question n’est pas réglée de façon satisfaisante sous l’angle juridique. Le Comité des droits de l’enfant a recommandé en 2011, dans les observations finales adressées à la Tchéquie, de stopper le programme de mise en place de « boîtes à bébé ».

En créant des « boîtes à bébé », la Suisse s’expose grandement à la critique. Le Parlement ne prévoit aucune nécessité d’action et n’a pas donné suite en 2009 à une initiative parlementaire à ce sujet. L’élargissement de l’offre et les recherches récentes approfondies font que ce point de vue n’est pas soutenable. La tolérance étatique face à ce développement dans une zone juridique grise menace la protection de droits de l’enfant de base.






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