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Défense des enfants international
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Démantèlement du droit d’asile : les parlementaires suisses n’épargnent pas les enfants
  
[ Bulletin DEI, mars 2006 Vol 12 No 1 p. 9 ]


Malgré les nombreuses mises en garde émanant d’ONG, du HCR, ou du Commissaire des droits de l’homme du Conseil de l’Europe, le parlement suisse a, lors de sa session d’hiver 2005, approuvé massivement la révision de la loi sur l’asile (LAsi) et la nouvelle loi sur les étrangers (LEtr). Cette décision fait de la Suisse le pays européen le plus restrictif en matière d’asile et remet sérieusement en question les engagements internationaux de notre pays en matière de droits de l’homme. L’adoption de ces lois a été ouvertement critiquée par de nombreuses organisations et associations suisses et internationales. Même la Croix-Rouge, pourtant connue pour son devoir de réserve, a pris position, estimant que cette loi bafouait la dignité humaine et portait atteinte au principe d’humanité ancré dans le droit humanitaire. Une coalition réunissant l’Organisation suisse d'aide aux réfugiés (OSAR), Amnesty International, Terre des Hommes et différentes œuvres d’entraide a immédiatement lancé un référendum.

Dans ce Bulletin, nous revenons sur les principales dispositions adoptées et plus particulièrement sur leurs implications pour les requérants d’asile mineurs. La nouvelle loi sur l’asile ne tient clairement pas compte de l’intérêt supérieur de l’enfant, tel que stipulé dans l’article 3 al1 de la Convention relative aux droits de l’enfant. Les nouvelles dispositions sont particulièrement inquiétantes en ce qui concerne le sort des mineurs non accompagnés (MNA), qui représentent 6% des requérants. Notre Etat a des obligations envers les personnes les plus vulnérables. Comment se fait-il qu’une majorité de parlementaires ait choisi d’omettre ces principes fondamentaux ?

La polémique ne date pourtant pas d’hier. En 2002 déjà, le Comité des droits de l’enfant demandait à la Suisse de mieux tenir compte des besoins des MNA en matière de représentation, d’accompagnement et de placement et de revoir son système de réunification familiale, jugé trop restrictif pour certaines catégories d’étrangers et de requérants. La réserve de la Suisse sur l’article 10 de la Convention des droits de l’enfant (CDE) touche à cette question et son retrait ne semble pas être à l’ordre du jour.

La nouvelle loi dispose que les requérants qui ne peuvent pas présenter de documents de voyage ou de papiers d’identité dans les 48 heures se verront frappés d’une « non entrée en matière ». Ces mesures s’appliquent sans distinction entre adultes, mineurs, ou familles. Jusqu’à présent des documents permettant d’identifier les requérants suffisaient. Cette nouvelle disposition ne tient pas compte du fait que 40% des enfants dans le monde ne sont pas inscrits dans un registre à leur naissance. D’autre part, une personne en provenance d’une région en crise, ayant fait l’objet de persécutions, de détention arbitraire dans son pays n’est souvent plus en possession de ses papiers d’identité. Par cette règle, la Suisse prend le risque d’exclure des personnes qui auraient droit à une protection internationale. Il s’agit là d’une violation des principes de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, inacceptable aux yeux du HCR et de la Croix-Rouge.

L’aide sociale sera également retirée à tous les requérants déboutés sans distinction. Ils devront alors recourir à l’aide d’urgence, souvent insuffisante pour se nourrir et se loger, et qui se situe bien en deçà de la protection et de l’assistance qu’un Etat doit fournir à un mineur selon les articles 3 et 22 CDE.

La loi permet, au titre de « détention pour insoumission », d’emprisonner des enfants dès 15 ans pour une durée pouvant aller jusqu’à 9 mois s’ils refusent de quitter le pays. Ils seront alors traités comme des criminels alors qu’ils n’ont commis aucun délit. Selon l’article 37 b CDE, l’emprisonnement de mineurs en dessous de 18 ans doit être une mesure de dernier recours et sa durée aussi brève que possible.

Enfin, les mineurs ne bénéficient pas de suffisamment de garanties en matière d’aide juridique et de nomination d’un tuteur ou d’un représentant légal pour les assister tout au long de la procédure.

La nouvelle loi sur l’asile ne fournit pas la protection requise pour les requérants mineurs, elle porte atteinte à l’article 11 de la Constitution fédérale, qui stipule que l’Etat doit encourager le développement de l’enfant. Les mineurs dont la demande aura été rejetée disparaîtront dans de nombreux cas dans la clandestinité, risquant ainsi d’être récupérés par des réseaux criminels ou de devenir la proie d’exploitants.

L’adoption de ces lois par le Parlement a suscité un tollé à travers tout le pays. Un grand nombre d’organisations, de partis, d’associations s’active à présent pour récolter les 60'000 signatures nécessaires au référendum. Si tout se passe dans les délais, les nouvelles lois devront passer le test des urnes d’ici à la fin de l’année. On espère que les Suisses sauront faire preuve d’un peu plus d’humanité que leurs dirigeants.

Pour signer les référendums, des feuilles de signatures sont téléchargeables sur Internet :
Loi sur l’asile : http://www.khs-csh.ch. Double référendum (LAsi et LEtr) : www.letr-non.ch




Sources :
∑ Parlement Suisse, note de synthèse 02.060, Bulletin officiel
∑ Croix-Rouge suisse, communiqué de presse du 20 décembre 2005 « le nouveau droit d’asile bafoue la dignité humaine »
∑ OSAR, Planète exil, juin 2005
∑ Coalition pour une Suisse humanitaire, communiqué de presse du 20 décembre 2005
∑ Terre des Hommes, conférence de presse du 21 décembre 2005 « non à une loi d’asile inhumaine »
∑ Swissinfo, articles du 9 janvier 2006 « Contre une loi sur l’asile inhumaine » et du 7 février 2006 : « Asile : la Suisse plus stricte que l’Europe »

Pour en savoir plus :
∑ Dossier des services du parlement : http://www.parlament.ch/f/do-asylgesetz
∑ Coalition pour une suisse humanitaire : http://www.khs-csh.ch
∑ Organisation suisse d’aide aux réfugiés : www.osar.ch
∑ Association suisse pour les droits humains : www.humanrights.ch







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